L'Amiénois, Journal Parodique qui paraît quand il peut.

Ce journal secoue les politiques qui "poussent bébert dans les orties". Il convoque les morts célèbres pour qu'ils règlent leurs comptes avec les vivants. Il donne aussi des recettes de cuisine. Beaumarchais écrivait : "Sans la liberté de blâmer, il n'est point d'éloge flatteur" et "Il n'y a que les petits hommes qui redoutent les petits écrits".

mercredi 2 juillet 2025

Stella Young : "Vous avez tout foutu en l'air !"

Stella Young : "Vous avez tout foutu en l'air"

Entretien exclusif avec l'activiste australienne qui a inventé le terme "inspiration porn", revenue d'outre-tombe pour constater le désastre

L'Amiénois : Stella Young, que pensez-vous de l'évolution de la situation des personnes handicapées ?

Stella Young : (Ricane amèrement) Bon sang ! C'est encore pire que ce que j'imaginais. J'avais créé le terme "inspiration porn" pour dénoncer l'instrumentalisation des personnes handicapées, et maintenant c'est devenu une industrie. TikTok, Instagram... Ils ont transformé nos vies en contenu clickbait. "Regardez cette personne en fauteuil qui fait ses courses, comme c'est INSPIRANT." C'est du délire. "Je ne suis pas votre source d'inspiration, merci !" disais-je lors d'un TEDx à Sidney en 2014. Observez ce qui se passe autour de vous et dites-moi si j'ai été entendue !

Photo de Stella Young en noir et blanc, elle sourit. Sur la photo, un message : "Je ne suis pas votre source d'inspiration, merci." Logo du journal dans le coin supérieur droit.
Stella Young, photo consultable ici : https://stellayoung.com.au/ 


L'Amiénois : Les réseaux sociaux ont donc aggravé les choses ?

Stella Young : (Explose) Aggravé ? C'est un vrai tsunami. Avant, on avait droit aux articles larmoyants dans les journaux, maintenant on a des millions de vidéos "feel-good". Des influenceurs valides qui filment des personnes handicapées à leur insu pour faire du buzz. Et le pire, c'est que certaines personnes handicapées jouent le jeu parce que ça rapporte. On s'auto-exploite pour quelques likes.

L'Amiénois : Que pensez-vous de ces associations gestionnaires qui parlent encore "au nom" des personnes handicapées ?

Stella Young : (Devient furieuse) "Rien sur nous sans nous." C'était pourtant pas compliqué à comprendre. Mais non, on a toujours ces associations gestionnaires dirigées par des valides qui décident pour nous. L'APF, l'ADAPEI... Des bureaucraties qui vivent SUR le handicap, pas AVEC. Ils organisent des colloques sur notre dos, touchent des subventions, et nous on reste à la maison parce que les réseaux dans tous les sens du terme, ne nous sont pas accessibles.

L'Amiénois :Précisément. L'accessibilité a-t-elle progressé selon vous ?

Stella Young : (Rire sarcastique) L'accessibilité... Ah, le grand mensonge. En 2025, on a encore des métros inaccessibles, des sites web illisibles pour les aveugles, des bâtiments avec trois marches "ce n'est pas beaucoup". Et quand on proteste, on nous dit "mais c'est cher". Comme si notre citoyenneté avait un prix. Les gouvernements dépensent des millions en campagnes "feel-good" sur l'inclusion, mais refusent de financer de vrais ascenseurs.

L'Amiénois : Les politiques vous déçoivent ?

Stella Young : (Tape du poing) Les politiques... Ils nous sortent pour les photos, nous planquent pour les budgets. On représente 20 à 25% de la population, mais on est invisibles dans leurs programmes. Macron, Sunak, Biden... Ils font tous la même chose : des grandes déclarations sur l'inclusion, et derrière ils coupent dans l'aide sociale. Et ne me parlez pas de ces quotas d'emploi bidons que personne ne respecte.

L'Amiénois : La montée de l'extrême droite vous inquiète ?

Stella Young : (Devient très sombre) Là, c'est carrément terrifiant. Trump, Le Pen, l'AfD... Tous ces fachos qui remontent. Et on sait très bien ce qui nous attend avec eux. Historiquement, quand les fascistes arrivent au pouvoir, on est les premiers à dégager. L'Aktion T4, ça vous dit quelque chose ? 275 000 personnes handicapées exterminées par les nazis. Et maintenant, on a des politiques qui parlent ouvertement d'eugénisme, de "qualité de vie", de "coût pour la société".

L'Amiénois : Ces discours sur le "coût" du handicap vous révoltent ?

Stella Young : (Hurle presque) LE COÛT... Mais on n'est pas des foutues machines défectueuses. On est des citoyens. Oui, l'accessibilité a un prix, et alors ? La démocratie aussi a un prix. On ne demande pas la charité, on demande l'égalité. Mais ces idiots d'extrême droite nous présentent comme des parasites. "Ils coûtent cher à la sécurité sociale." Et eux, ils coûtent combien avec leurs âneries ?

L'Amiénois : Le validisme vous semble-t-il mieux compris aujourd'hui ?

Stella Young : (Soupire) Le validisme ? On commence à peine à en parler. Les gens découvrent le mot et croient avoir tout compris. Mais le validisme, c'est structurel. C'est dans l'architecture, dans les mentalités, dans les institutions. Ce n'est pas juste éviter de de prendre des noms de handicaps pour en faire des insultes. C'est repenser toute la société. Et ça, personne n'est prêt à le faire. Le handicap est politique, il manque la volonté, il manque les actes.

L'Amiénois : Ces influenceurs handicapés qui "inspirent" sur les réseaux ?

Stella Young : (Grimace) Écoutez, je comprends qu'ils aient besoin de vivre... Mais certains alimentent exactement le système que je dénonçais. "Regardez, je suis heureuse malgré mon handicap." Malgré ? MALGRÉ... Notre bonheur n'a pas à être conditionné par la présence ou l'absence d'un handicap. On peut être heureux, point. Pas "malgré" ou "grâce à". On normalise notre propre oppression.

L'Amiénois : Y a-t-il des motifs d'espoir ?

Stella Young : (Réfléchit) Il y a quelques militants qui tiennent bon... Des collectifs comme "CLHEE", des activistes qui refusent la charité et exigent la justice. Mais ils sont noyés sous le bruit des "inspiration warriors" et des associations gestionnaires. C'est David contre Goliath, sauf que David est en fauteuil et Goliath contrôle les budgets.

L'Amiénois : Un message pour ceux qui nous lisent ? Particulièrement pour les valides ?

Stella Young : (Avec détermination) Écoutez-moi bien. Arrêtez de nous voir comme des héros du quotidien. Arrêtez de nous filmer à notre insu. Arrêtez de parler à notre place. Et surtout, SURTOUT, ne votez jamais pour des fachos qui nous considèrent comme des sous-humains. On veut l'égalité, pas la pitié. On veut l'accessibilité, pas l'inspiration. Et si ça vous dérange, c'est votre problème, pas le nôtre.

L'Amiénois : Merci Stella.

Stella Young : (En partant) Et rappelez-vous : "We are not here for your inspiration." Si vous ne retenez qu'une chose, que ce soit ça.


Propos recueillis par L'Amiénois, le journal qui réveille les activistes pour qu'ils secouent les consciences endormies.


À l'adresse des validistes...

Ce journal se présente comme étant PARODIQUE, mais les critiques prêtées à Stella ne sont malheureusement pas si éloignées de ce qu'elle pourrait penser. Son combat contre l'"inspiration porn" est plus nécessaire que jamais à l'ère des réseaux sociaux.

"We are not here for your inspiration."

Stella Young - 1982-2014

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